23 fevrier 2006 - la ligue des champions

Même si l'arbitrage alimente encore la chronique, la performance du FC Barcelone mercredi à Chelsea doit davantage à la maturité collective de la formation catalane qu'au carton rouge infligé à Del Horno. Rijkaard avait raison. Le Barça, toujours aussi talentueux, a beaucoup grandi depuis un an.

Décidément, pas une confrontation entre ces deux là ne semble devoir être à l'abri de la polémique. L'an dernier, au Nou Camp, l'exclusion sévère de Drogba avait provoqué la furie de Jose Mourinho, le Portugais accusant son homologue Frank Rijkaard d'avoir séjourné dans le vestiaire de l'arbitre, Anders Frisk, durant la pause. Menacé de mort, écoeuré, le Suédois jettera l'éponge et le sifflet en même temps quelques semaines plus tard. Au retour, à Stamford Bridge, le quatrième but des Blues, celui de la qualification, fut entaché d'un placage de Ricardo Carvalho sur Valdes, le portier catalan.

Mercredi soir, la nouvelle "guerre des étoiles" a accouché de son petit imbroglio arbitral. Presque naturellement. L'arrière gauche espagnol de Chelsea Asier Del Horno méritait-il d'être expulsé pour sa charge sur Messi? Le génial petit argentin, par ailleurs coupable au préalable d'une faute sur Robben, en a-t-il rajouté? Et Carles Puyol, le rugueux défenseur du Barça, n'aurait-il pas dû rejoindre, voire précéder son son compatriote aux vestiaires avant l'heure? Oui. Non. Peut-être. Peut-être pas.

Le plus complet

Evidemment, Jose Mourinho s'en est donné à coeur joie. "Comment dit-on tricheur en catalan", a-t-il demandé sitôt la rencontre terminée. Barcelone est une grande ville culturelle, avec beaucoup de théâtres. Manifestement, Messi a beaucoup appris là-bas. C'est déjà un très bon acteur." Réplique de Frank Rijkaard: "L'arbitre a pris sa décision. C'est son choix, je ne préfère pas parler de l'arbitre. Je vois des fautes tout le temps sur Messi. Je peux vous dire qu'il n'est certainement pas le genre de joueur à surjouer après une faute."

La polémique est (re)lancée. Mais l'essentiel est ailleurs, n'en déplaise à Jose Mourinho. Le charismatique technicien lusitanien a beau jeu de considérer aujourd'hui que l'arbitre a ruiné les chances de son équipe, et de laisser entendre qu'à 11, l'issue eut été différente. C'est en partie vrai, bien sûr. N'importe qu'elle équipe jouant à dix pendant plus de 50 minutes se trouve pénalisée. Si M.Hauge n'avait vu rouge, les chances de qualification de Chelsea seraient certainement plus élevées ce matin. Mais le Barça était bien le plus complet et le plus fort sur la "pelouse" du sud de Londres. Même avant l'expulsion de Del Horno, la maitrise et les occasions étaient catalanes.

Frank Rijkaard avait donc raison en affirmant que son équipe avait grandi depuis la double confrontation de février 2005. A l'époque, même si le talent était déjà plus abondant côté Barça, Chelsea possédait une longueur d'avance en termes d'équilibre collectif, de densité physique et, surtout, de solidité défensive. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. "On a montré beaucoup de maturité, on est resté très concentré mentalement, savoure l'entraîneur néerlandais. On savait que c'était ce qu'il fallait contre un grand adversaire."

Changement de mentalité

Même après l'ouverture du score heureuse des Blues à l'heure de jeu, provoquée par le genou de son milieu brésilien Motta, Barcelone ne s'est pas affolé. Au contraire. Ce coup du sort a semblé libérer les jambes et les têtes espagnoles, jusqu'alors hésitantes dans la tactique à adopter. "Paradoxalement, je pense que le but de Chelsea nous a aidés, confirme Rijkaard. J'ai vu un changement de mentalité chez mes joueurs après ce but. On a réagi de manière très positive." Chelsea avait eu le tort de se livrer. Mourinho aurait dû se montrer plus conservateur et tenir le 0-0, et même le 1-1. Le deuxième but du Barça est d'ailleurs venu sur un contre, suite à un corner en faveur des Blues.

Physiquement, les joueurs du "Special One", le nouveau sobriquet de Mourinho, ont explosé dans les 25 dernières minutes. Or la moindre lacune athlétique ne pardonne pas devant des talents comme Ronaldinho, Eto'o ou Messi. Lancé sur une voie royale, le Barça n'a plus qu'à parachever son oeuvre dans deux semaines, chez lui. Rijkaard prévient déjà: "On doit encore finir le travail et ce ne sera pas facile. On ne peut pas se reposer sur nos lauriers, Chelsea est trop fort pour ça. On doit se concentrer sur notre boulot, avoir de l'envie." Une occasion de plus d'afficher sa nouvelle maturité.